Premier essai : Audi RS6 Performance (C8)

Pour le commun des mortels, c’est seulement un break Audi, probablement un diesel, transportant 5 personnes, dont 3 enfants. Pour nos yeux aiguisés, les jantes de 21 pouces, les étriers rouges, les arches bombés et la double sortie d’échappement ovales ne trompent pas ; Il s’agit de l’une des voitures les plus appréciées de la production automobile. La RS6. Le break le plus aimé et connu au monde. Ce dernier entre aujourd’hui dans sa 22è année de service et sa quatrième génération avec cette version C8.

La recette est la même depuis plus de deux décennies, il faut le mentionner, Audi arrive très bien à créer un mixe entre l’agressivité d’une RS et la stature de l’A6, pour autant cette version est moins consensuelle que la celle qu’elle remplace, la C7, qui ressemblait vraiment à une RS « A6 ». La version 2020 dispose d’optiques avant et arrière uniques (emprunter à l’A7), des boucliers spécifiques et d’autres détails. Notre version Performance apporte des très belles jantes avec une finition en Néodyme du plus bel effet avec cette peinture Gris Nardo. 

Je me rappelle, début 2020, lorsque le COVID n’était encore qu’un simple virus dans une ville en Chine de l’Ouest, certain journalistes s’offusquaient du fait que cette nouvelle RS6 ‘C8’ développait seulement 600 chevaux, soit 5 de moins que la déclinaison Performance de la version C7. Pour autant, personne n’eut le cran de dire que ce nouveau break était lent. Mais nous voilà en novembre 2022, Audi lève le voile sur la version Performance de la C8, avec 630 chevaux.

Il nous faudra attendre début 2024 pour en prendre le volant, par un grand froid de lundi matin en plein mois de janvier. Je me voyais déjà prendre la route avec cette RS6, faire un grand trajet, mais voilà, sur le même laps de temps les agriculteurs décidaient de bloquer Paris et je ne me voyais pas dire aux équipes de la presse d’Audi France que leur belle voiture était désormais sous les roues d’un tracteur, alors je pris la sage décision de rester en Ile-de-France. Pour me consoler, j’allais utiliser la RS6 sur des trajets pendulaires, entre le centre de Paris et La Défense, puis évidemment un peu sur voies rapides. Je suis alors dans le 15 arrondissement, mettant le GPS vers La Défense, un trajet sans accrocs, et particulièrement calme. La RS6 se révèle confortable, se faisant presque oublier. Mais c’est le soir, au moment de fermer l’ordinateur et de prendre l’ascenseur direction le parking que la RS6 est là, attendant sagement comme un labrador. Je mets le contact et tout le parking plonge dans le grondement du V8 de 4.0 litres, ce-dernier ferme très vite ses valves, pour mon plus grand regret. C’est sur trajet urbain, contre toutes attentes banal, que la RS6 va montrer sa plus belle facette.

Le V8 4.0 litres est un moteur que j’ai connu sous une forme assez rare, notre seule rencontre fut avec une Bentley V8 S GTC. Pourquoi une forme assez rare me diriez-vous ? Car, ce moteur très souvent associé à une boite à convertisseur de couple, fonctionne, chez Bentley et Porsche, de concert avec une boite DoppelKupplung (double embrayage). De nos jours, nous ne jurons plus que par les boites à double embrayage, au détriment du confort à basse vitesse. La RS6 est équipé d’une boite S-Tronic, à chaque réaccélération la boite est douce, mouline un peu, renforçant ce sentiment de puissance et de couple. Cette version Performance perd 8 kilos d’isolation entre l’habitacle et le compartiment moteur, ainsi, avec les échappements ouverts, le V8 investit la cabine à chaque mise en mouvement.

La suspension est très prévenante et confortable, allant parfaitement avec l’esprit de la RS6. Le V8 est aussi équipé d’une micro-hybridation 48V, aidant les relances et éteignant le moteur avant l’arrêt total du véhicule. Evidemment, l’intérieur est aux standards d’Audi et toutes les commodités modernes sont disponibles, de l’Apple CarPlay, aux doubles écrans tactiles, en passant par le volant chauffant.

Et pourtant, malgré ses atouts résolument modernes, il y a un sentiment de déjà vue avec cette RS6. En effet, la version C8 arrive juste avant une révolution (la prochaine A6 sera 100% électrique) et on sent une infusion importante de la version C7. Le moteur, le châssis, la boite de vitesse, le Quattro, sont presque tous repris de la version d’antan. A la manière de la Porsche 911, Audi a fait du neuf avec du vieux pour sa RS6 C8. Et, dans un monde automobile rythmé au son des lancements de véhicules hybrides et électriques, la RS6 fait preuve de fraicheur.

Ce sentiment « old school » est encore plus présent quand on la compare aux M5 et E63s, toutes les deux sont plus puissantes, plus économiques, plus alertes, avec un châssis qui ne peut être comparer a celui de la RS6, mais celle Ingolstadt a ce pedigree et cette homogénéité unique. Sur l’autoroute, perché sur le 8è rapport, la RS6 se révèle être confortable, silencieuse, faisant office d’un missile intercontinental, avec un coffre de 560 litres et 5 passagers. La consommation reste élevée malgré l’essai d’une micro-hybridation qui, de toutes les manières, a haute vitesse n’a plus d’utilité. On se retrouve aux 130 km/h réglementaire très vite lors d’une sortie de péage, le 4.0 litres pousse très fort tout au long du compte-tour, sans relâche, certes la boite n’est pas la plus rapide lors des changements de rapports mais compense par son caractère. Pour autant, n’essayez pas d’utiliser les palettes, qui sont toujours très mal placées et trop petites.

Sur petites routes, les roues arrières-directrices font des miracles et font oublier les 2 tonnes et 5 mètres de longueur. Cette version Performance gagne en agilité grâce à l’apparition d’un différentiel central autobloquant. Notre modèle d’essai dispose aussi du pack Dynamic RS (Plus), permettant de relever la vitesse maximale à 305 km/h et d’avoir des suspensions plus dures mais aussi plus adaptés en cas de conduite soutenue. Le pack Dynamic RS vient d’origine avec la version Performance, qui d’ailleurs devient le seul modèle en vente en France désormais. Il y a donc maintenant un pack Dynamic RS Plus, qui amène des freins en céramique pesant 34 kilogrammes de moins que les versions en acier, de plus, les jantes sobrement nommées “en Y”, spécifiques à la version « Performance » font gagner 20 autres kilos, soit 54 kilogrammes total de masse non suspendues (20kgs pour les jantes + 34kgs pour les freins). Ainsi, et ce chiffre vient de moi, en comparant a une version RS6 normale frein aciers, la version Performance avec le pack Dynamic RS Plus, pèserait 62 kilogrammes de moins.

En sortie de virage la RS6 accuse tout de même ses 2090 kilos à vide, mais Audi a fait un merveilleux travail afin d’assainir cette nouvelle Performance en conduite sportive, bien aidé par les 850Nm, disponible dès 2200 tr/min. La transmission Quattro est une fois de plus là pour sécuriser toute accélération mettant très vite en confiance n’importe quel conducteur, pour autant, les vitesse atteintes sont très vite très hautes, par exemple, les 100 km/h ne prennent que 3,4 secondes officiellement, dans la vraie vie et dans des bonnes conditions un « sub » 3 secondes est atteignable.

Conclusion :

En conclusion, la RS6 n’est pas une offre intéressante, c’est une offre unique avec une homogénéité presque incomparable dans la production automobile. La nouvelle RS6 a un goût d’ancien mais aussi un goût d’intemporel, comme le point culminant des voitures à combustion. Elle n’est pas exempte de défaut mais sa rondeur est difficile à mettre en cause. La RS6 est comme l’iPhone, pris sur des points individuels il y a toujours une meilleure proposition, la Panamera Turbo est plus puissante, un GLE 63 a plus de place à l’intérieur, une M5 est plus sportive, une E63s est plus technologiques et a un meilleur moteur, un Range Rover est plus confortable, un Bentayga plus luxueux… Mais une fois tout mis en exergue dans ce break Audi, la RS6 devient presque imbattable, de la même manière que je peux parier que vous ne changerez pas votre iPhone même si le nouveau Samsung a un meilleur appareil photo et le nouveau smartphone Google est plus rapide. La même chose s’applique avec la RS6, et cette nouvelle version Performance est une démonstration de force pour Audi et pour le dernier break thermique sportif de la marque aux anneaux.

Merci à Audi France et en particulier à Sabrina et Philippe.

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