En route vers l’Ouest
L’Europe aime la Classe S, pour preuve, en 2021, plus de 11 000 unités fut vendu en Europe, pour autant, sa version SUV, le GLS ; accuse plus de deux fois moins de ventes. De l’autre cote de l’Atlantique la tendance est complètement inverse, pour 14 000 Classe S vendus, le GLS s’est écoulé à 24 000 unités. On pourrait s’attendre à voir ce schéma se répéter avec le nouveau EQS SUV, mais il se pourrait que cela ne soit pas le cas.
Je me rappelle monter, en 2020, dans le GLS pour la première fois et me dire qu’il ne s’agissait pas d’une Classe S SUV mais plus d’un gros GLE. L’intérieur notamment, bien qu’il était au niveau du haut de gamme Mercedes, il n’était pas au niveau d’une Classe S , ce constat se faisait aussi sur le confort. Alors, a moins d’avoir une passion incommensurable pour les SUV, je ne comprenais pas l’intérêt du GLS.
Alors lorsque Mercedes me proposa d’essayer l’EQS SUV, l’envie était mitigée, puis la raison pris le dessus en disant ‘oui’. Je m’attendais à la berline EQS en plus haute avec un intérieur moins bien, car c’est comme cela que le GLS fut créé. Et pourtant il n’en fut rien.
Me voila au siège de Mercedes, prenant en main ce nouveau SUV électrique, et de suite je comprends que Mercedes n’a pas fait d’économie sur l’intérieur, il est aussi bien que l’EQS, avec l’HyperScreen et cette couleur clair lui va à ravir. Impossible pour le moment de trouver une faute de mauvais goût ou un plastique de mauvaise qualité. Tout les assemblages sont parfaits, les inserts sont ajustés au micron près et j’aime par-dessus tout les étoiles en métal incrustés dans le bois. Les sièges sont ajustables sur plus de 20 façons différentes, le MBUX (l’interface du système d’info-divertissement) coiffe encore aujourd’hui sa catégorie, les éclairages d’ambiance font bien leurs travail, il y a beaucoup d’espace pour les passagers arrières et le coffre fait plus de 645 litres. Je remarque aussi l’énorme pilier-A qui pourra bloquer la vision notamment dans les descentes de parking. Ainsi la position de conduite est bonne, mais l’ensemble semble moins pratique que l’EQS, c’est-à-dire que vous pouvez baisser le siège autant que vous voulez, mais vous ne verrez plus le combiné d’instrument, qui lui-même est incliné vers le haut, vous poussant a monter le siège et vous retrouver très près du plafond.
A la prise en main et durant les premiers mètres on ne sent pas les 2,8 tonnes (2,9 tonnes sur la balance d’Autocar à Millbrook), s’élancer est fluide et sans accroc et on sent de suite les roues arrières directrices à 10 degrès, permettant un rayon de braquage aussi petit que celui d’une Classe A (11m). Un bon point pour une voiture de plus de 5,12 mètres de long et 1,95 mètres de large. Je me retrouve très vite sur l’A86, à 90km/h, ou l’EQS est aussi silencieuse que sa version berline. Le premier trajet se passe comme une Classe S l’aurait voulu, c’est-à-dire que l’on arrive à destination aussi frais quand l’ayant quitté, sans un maux au dos ou aux jambes par exemple.
Les nouveaux EQS et EQS SUV ont fait couler beaucoup d’encre par leurs designs que je trouve honnêtement très réussi. Le biomimétisme afin d’avoir une forme de goutte d’eau et ainsi améliorer la pénétration dans l’air est très appréciable. Ainsi l’EQS SUV se retrouve avec un cx de 0,24, en compariason, une Lamborghini Aventador culmine à 0,43 et un BMW X5 à 0,31.
Evidemment lors des escapades urbaine l’EQS se fait oublier, par son silence et sa douceur de fonctionnement, pour autant lorsque les rues se resserrent, comme dans le centre de Paris, il faut réduire l’allure. Le confort n’est pas au niveau d’une Classe S, évidemment, du notamment au poids s’approchant des 3 tonnes, pour autant, et c’est encore une fois la bonne surprise, le confort est au niveau de l’EQS malgré la garde au sol rehaussé. Malgré les dimensions de paquebot, l’EQS SUV passe plus inaperçu dans la circulation contrairement au GLS avec sa face très carré. Ici le profil et l’avant sont aérodynamiques et donnent un aspect visuel moins massif. Et puis, avec les roues arrières directrices je me prends tout de même à utiliser ce EQS de la même manière qu’une Clio par exemple, en faufilant le pachyderme partout dans Paris, bien que les rampes de parking sous terrain soient un challenge.
En m’engageant sur autoroute je vois tout de suite le terrain de prédilection de ce EQS SUV, à 130km/h aucun bruit ne vient troubler mon évolution et je peux profiter de toutes les commodités misent en place par Mercedes pour choyer ses occupants, sièges massant, EnergizingComfort, éclairage d’ambiance… Tout se veut réconfortant. Pour autant, sur petites routes le résultat n’est pas aussi bon, on sent le poids de ce SUV, tant sur les freinages que sur les mises en appuis. Même si le châssis n’est pas le point limitant, la souplesse des suspensions ne permet pas d’évoluer de manière très soutenue sur ce genre de terrain. D’un autre côté, ce n’est pas ce qu’on lui demande à cet SUV électrique. Les reprises en sortant d’un virage sont vives, avec ses 544cv, 860Nm de couple et son 0-100 en 4,7 secondes, l’EQS ne se fait pas attendre. Je noterais tout de même une très mauvaise pédale de frein, donnant un freinage très peu progressif, et même en ville ce dernier est compliqué à gérer. En conclusion, lors d’une conduite sportive l’EQS SUV semble peser 500 kilos de moins, et reste très agile pour un véhicule près de demander à ses clients de passer le permis poids lourd et conserve un sentiment très sain lorsque l’on hausse le rythme mais, évidemment, il n’est pas fait pour cela. On sent aussi le manque de barres anti-roulis, donnant beaucoup d’amplitude latérale et laissant une claire visibilité sur les limites du châssis. Dès que l’on baisse l’allure et qu’on retourne sur des routes droites, chose dont l’EQS SUV trouvera en abondance de l’autre côté de l’Atlantique, là où il est, au passage, produit, l’EQS est à son aise. L’expérience de conduite est dans son ensemble aussi plaisante que la berline, et on apprécie grandement la position haute de conduite. Le confort reste inchangé, même si l’EQS berline est tout de même plus à l’aise sur petites routes. Je retrouve le même défaut que l’EQS berline, celle de la suspension primaire peu confortable. Par exemple, dans la Classe S vous ne sentez pas les plaque d’égouts, ce n’est pas le cas sur les versions EQS ou toutes les petites aspérités se ressentent et remontent dans le siège. Cela vient surement du poids (presque 1 tonne de plus qu’une Classe S thermique), mais aussi surement de contraintes budgétaire et des décennies d’expérience dans l’automobile à moteur a combustion de luxe de Mercedes.
Evidemment, même si l’EQS SUV essaye d’être le plus aérodynamique possible, il ne faut pas avoir fait des études supérieures pour comprendre que son coefficient de trainé est bien plus élevé que sur la berline. Cela se ressent sur l’autonomie. Avec la même batterie, c’est-à-dire celle de 100kWh, ne comptez plus faire 800km en ville avec une charge comme c’était le cas avec la version berline. En ville, évidemment l’aérodynamique n’est pas un facteur limitant mais le poids l’est. Sur autoroute aussi, l’autonomie ne peut être comparé à l’EQS première du nom, en effet 400 kilomètres seront le maximum une fois sur voie rapide. La consommation s’établie à 25kWh/100Km sur autoroute à 130km/h et autour des 19-20kWh/100km sur route, comprenez cycle mixte. En ville, la consommation, en mode « ECO » avec la régénération en mode automatique peut descendre à 16-17kWh/100km.
Mais il y a un endroit ou Mercedes fais beaucoup mieux que ses concurrents. La conservation de son identité. Alors qu’il y a virtuellement aucune différence entre une Zoe, une ID3 ou une MINI Cooper SE, tant sur la conduite que sur le feeling, Mercedes a réussi, malgré l’absence de moteur à conserver une identité forte, avec son intérieur, son confort, dans la façon dont l’EQS évolue sur la route. L’EQS SUV est une manière pour la marque à l’étoile d’exprimer ce que les ingénieurs et designers savent faire mais c’est aussi une voiture qui répond aux lois du marché avec des segments porteurs de croissances, les SUV et les voitures électriques. On aurait pu penser que Mercedes effectue le travail qu’a moitié, en reprenant un GLS, incorporant quelque batterie, et cela aurait probablement été succès commercial outre-Atlantique ; mais c’est mal connaître les salariés de Stuttgart. En outre ce n’est pas un « gros 4×4 électrique Mercedes » mais bel et bien un vrai exercice unique avec tout l’ingénierie que cela demande.
Mais cela en fait-il une proposition pertinente pour l’Europe. Le mammouth construit dans l’Alabama est, comme écris dans cet article, plus tôt à l’aise sur les routes en Europe. Pour autant, il reste plus grand que la plupart des « gros » SUV électrique, qui sont déjà trop gros. Mais les 5 mètres de longueur apportent tout de même une 3è rangée de sièges permettant de loger 7 personnes. La plateforme EVA2, aussi utilisée pour les versions EQE et EQS berline permet à Mercedes de dimensionner tout de manière XXL. Par exemple la batterie, originellement de 108,4kWh passe pour les modèles produit à partir de janvier 2024 à 118kWh soit presque 10% de plus. Elle contient aussi 10% de Cobalt d’origine « non-contrôlé » en moins. Cette plateforme permet aussi d’avoir des dimensions plus petites qu’un GLS, mais avec un empattement plus grand, utilisant tous les bénéfices d’une plateforme sans moteur à combustion. C’est-a-dire aussi, utiliser la chaleur produite par le pack de batterie afin de retirer la pompe à chaleur pour chauffer l’habitacle. Cette plateforme et le fait qu’elle soit électrique amène un silence monacal (60db à 90km/h) très agréable pour les occupants. Au fil des kilomètres je vois l’attrait de ce SUV, extrêmement moderne, liant écologie (étant donné que ce modèle est disposé à faire beaucoup de kilomètres et donc compenser son empreinte carbone), position de conduite haute, luxe et confort.
En conclusion, et cela ne sera une surprise pour personne, il y a peu de chance que le SUV EQS soit un réel succès commercial en Europe. Il reste très imposant, très cher et les systèmes de transport en commun sont presque trop développées pour accueillir un tel marché. Pourtant je peux voir la version Maybach très bien se vendre, car elle rajoute réellement quelque en plus dont le « banal » EQS SUV ne peut que rêver. De plus, il est seul dans son marché des SUV électrique de luxe, l’iX et le Q8 e-tron ne proposent en aucun cas des qualités intérieures et de confort similaires. Pour autant, je sais déjà que les Etats-Unis seront un excellent marché pour ce SUV. Les routes, l’infrastructure et les situations socio-économiques des gens, notamment en Californie, en font en marché particulièrement attractif pour une voiture si en avance mais destinée à laisser un important héritage.
Notes, mentions et conclusion :
Mercedes ouvre une nouvelle fois la boite de Pandore, devenant le premier constructeur à offrir un SUV électrique de vrai haut standing, comparable à une Classe S dont elle prend les codes. Ce nouveau EQS SUV trouvera difficilement son public en France, mais d’autres régions dans le monde l’adopterons en masse pour sa stature, ses qualités, son efficience et car il s’agit d’un véritable morceau d’ingénierie complet, de la propulsion aux système d’info-divertissement, en passant par les liaisons aux sols et la batterie, l’EQS SUV semble, une fois de plus, prendre toute la technologie chez Mercedes pour la mettre en exergue dans une voiture.
Score : 77/100
Extérieur – 16/20
Intérieur – 18/20
Moteur – 14/20
Dynamisme & Sensations – 12/20
Confort & Praticité – 17/20
Merci à Mercedes-Benz France et en particulier à Julien, Fanny et Jean-Luc.