Jusqu’au dernier souffle.
C’est l’un des essais de 2020 qui nous avait marqué et attristé. Marqué car la Megane RS était impressionnante. Attristé car la Megane RS faisait son baroud d’honneur avec cette génération. En effet, la marque au losange ne prolongera pas l’existence de l’une des meilleures compactes du monde au delà de 2022, pour des raisons que nous connaissons tous. La Megane RS c’est 3 générations d’automobiles hyper-compétentes, toujours en avance sur ses concurrentes et avec une philosophie et un héritage comme nul autre. Il était de notre devoir de vérifier si cela est toujours le cas.
Il y a ce “je-ne-sais-quoi” qui la rend spéciale.
Une histoire unique
La Megane RS voit le jour en lors de la 2è génération, celle avec sa lunette arrière courbée et verticale. Vous ne vous rappelez plus de la Mégane 1 ? Il s’agit de cette berline avec une poupe drolement remontée et des feux arrière noires et rouges. Vous vous souvenez à présent ? Mais revenons à notre Mégane 2, lors de la présentation de la R.S., lors du salon de Francfort de 2003, elle fait déjà sensation avec son train avant à pivots indépendants. Animée par le moteur F4RT, un 4 cylindres, 16 soupapes avec bloc en fonte, elle délivre déjà 225 chevaux et 300Nm dès 2000tr/min ! Les plus connaisseurs se rappeleront aussi de la R26, une Megane RS avec plus de puissance et moins de poids donnant naissance à la R26 R, la Mégane la moins acceuillante avec un arceau à la place des sièges arrières, plus de puissance et avec (encore) moins de poids.
Avec ce succès Renault réitérera avec sa Mégane 3 et une présentation de la version R.S. en 2009. Disponible à sa sortie avec deux châssis, “Sport” et “Cup” ainsi qu’un différentiel à glissement limité (uniquement disponible sur la Cup), elle deviendra très vite l’une des favorites de la presse spécialisée et portera les couleurs de Renault Sport au-dela des frontières Européennes, jusqu’en Australie où la Mégane trouvera plus de 2300 preneurs en l’espace de 5 ans. La motorisation continue avec le F4RT mais passe à 250 chevaux tout en gagnant 20 Nm. Son succès se fera aussi avec plusieurs éditions dont une Red Bull Racing, une version “Trophy 265”, “RS 275” et surtout Trophy-R, reprenant la recette de la R26 R.
Mais en 2017 à Francfort, Renault fait table rase avec sa Mégane IV RS qui opére une réelle rupture avec les modèles précédents. On note l’apparition de 4 roues directrices (4 Control), système inauguré sur la Laguna 3 et la disparition du moteur F4RT au profit d’un 1,8 litres (contre 2 litres avec les précédentes). Ce moteur prend sa base avec le M5Mt de la Clio R.S. en 1.6 litres, et est élargit à 1.8 litres pour une puissance de 275 chevaux et 400 Nm, il sera sobrement appelé M5Pt… Une version Trophy-R fera évidemment son apparition ainsi qu’un restyage en 2021 (notre modèle d’essai), disponible uniquement avec la boite de vitesse EDC dû au malus en France ne faisant plus sens de proposer la boite manuelle. Malheuresement, l’an prochain la Mégane RS fera son au-revoir et laissera derière elle plus de 20 ans d’ingénierie de pointe chez Renault Sport, et nous vous le promettons, nous ferons, bientôt, un article spéciale où nous essayerons les 3 génération de la Mégane RS. Entre 2004 et 2009, 22 455 exemplaires de la Mégane II RS auront été produits et 30 040 exemplaires entre 2010 et 2016 pour la Mégane III RS.
Au goût du jour
Ayant déjà essayé sa devancière, j’épargnerai ici la présentation intérieur et extérieur de ce restylage en me concentrant sur les changements. A l’extérieur, les optiques évoluent, les feux avant reçoivent des LED et ceux à l’arrière abandonnent la formation 3D pour s’habiller d’une surface plane. Évidemment, eux aussi, passe au tout-LED sans dénaturer l’esprit de la Megane. Le dessin général n’évolue pas, ce qui est un très point, la Megane étant une voiture extrêmement bien proportionnée.
La Megane RS se bloque, enlace le virage comme s’il s’agissai d’une rampe de lancement.
On notera toujours la présence des anti-brouillares en forme de damier du plus bel effet, du magnifique jaune Sirrus sur notre modèle d’essai, ainsi qu’un logo en 2D accueillant les radars pour le régulateur de vitesse adaptatif.
L’intérieur évolue aussi avec parcimonie. Les sièges Recaro sont toujours extrêmement confortables tout en offrant un maintien latéral optimal. La position de conduite perdure sur ce restylage et est toujours parfaite ; pour autant le placement des palettes est toujours aussi mauvais, elles sont fixes, et sont trop courtes, ne descendant pas jusqu’à la fin de la branche du volant… mais je lui pardonne ce petit écart. La bonne surprise vient du combiné d’instrumentation avec une définition à faire pâlir les marques d’outre-Rhin et une personnalisation très facile d’accès. Pour autant, le système n’est pas des plus pressé et peut mettre quelques secondes pour passer d’un mode à l’autre. Le système d’info-divertissement évolue aussi en profondeur avec un écran en haute définition et une intégration d’Apple CarPlay surprenante pour un écran au format portrait. A part cela, ce restylage conserve l’ambiance générale de sa petite sœur avec de l’alcantara à profusion, tant devant que sur la banquette arrière et des surpiqûres rouges du plus bel effet.
Equilibre
Des les premiers tours de roues la Megane RS est spéciale, la direction est vivante, les suspensions sont fermes, la pédale est progressive et un jolie ronronnement investit la cabine. Et, première surprise, la boîte EDC. Sur la génération précédente elle n’était pas un défaut mais n’était surtout pas une qualité. Renault avait, sur l’Alpine, extrêmement bien retravaillé cette boite qui était devenue extrêmement rapide tant en mode automatique que manuelle. Sur cette nouvelle génération de Megane RS c’est la même recette. Une boîte souple et rapide faisant penser à une DSG au pays de Volkswagen où même mieux, à la PDK de chez Porsche. Cette EDC 2021 utilise le couple et lors d’une conduite souple il n’y a aucune ni coupure ni hésitation. Et si l’envie vous prend d’appuyer sur l’accélérateur, en une fraction de seconde le Megane tombe plusieurs rapports avec une rapidité impressionnante
Cette façon dont la suspension épouse la route, la direction communicative même lors d’un simple changement de file et ce moteur qui investit la cabine.
Même en mode confort, la Megane RS trahit sa réelle volonté. Le premier virage, même à basse vitesse est révélateur et il est impossible de la confondre avec une Megane plus “conventionnelle”. La chassis me communique toutes les humeurs de la voiture et la direction me transmets toutes les aspérités de la route. Pour autant, en mode confort, malgré une suspension ferme au premier abord, la Megane RS n’est pas inconfortable et j’évolue sans aucun mal entre les différents pièges de la route. Les 5 places, le coffre de 300 litres, la boîte de vitesse rapide et l’insonorisation me font me demander si cette nouvelle Megane RS ne s’est pas embourgeoisée durant ce restylage.
Pour m’en rendre compte je dois d’abord prendre un bout d’autoroute qui me laissera l’opportunité d’apprécier les qualités de routière de cette Megane. Perchée sur le 6e rapport à 130km/h, la compacte française avale les kilomètres sans effort. Mais une fois de plus, malgré un tableau qui me fait penser à un certain embourgeoisement, la Megane est toujours aussi communicative. Son châssis, sa direction, la gestion de la suspension, même dans la monotonie de l’autoroute il y a ce “je-ne-sais-quoi” qui la rend spéciale. Mais bon, même avec tant de qualités cela m’étonnerait que vous achèteriez une Megane RS pour faire de l’autoroute, non ? Alors j’emprunte la première sortie et avant de m’insérer dans la voie de décélération, qui signe un magnifique lacet selon le GPS, j’appuie sur le bouton “sense” et la Megane passe en sport. Je me jette alors dans la voie de sortie limitée à 70km/h avec la vitesse de l’autoroute. Un petit peu de frein pour faire marcher le transfert des masses et c’est l’apothéose. La Megane RS se bloque, enlace le virage comme s’il s’agissai d’une rampe de lancement. Cela me donne directement une première idée des prestations de la compacte française que j’emmène désormais sur des petites routes, son terrain de jeu favori.
Et c’est ici, où la route épouse le paysage que la Megane RS brille, c’est en s’élançant de virage en virage, pivotant autour des hanches de son conducteur qu’elle exergue ses qualités, tant dynamiques que mécaniques. Les roues arrières directrices que j’appéciais tant en ville pour leurs praticités travaillent ici de concert afin d’enrouler le virage le plus vite possible. Alors que je repasse la 1èr à l’approche d’une petite épingle, je sens, une fois en sortie, le train avant chercher de la motricité, la direction devient très légère mais une fois que la 2è passe, le train avant grippe et c’est un coup de catapulte pour les occupants ! Je me rends aussi compte de l’importance que les pneus soient bien chauds avec la Megane RS, représentant la condition sinéquanone pour augmenter le rythme sans se faire de frayeur.
Je reviens sur son comportement sur autoroute, car c’est l’une des seules voitures avec laquelle je voulais que la route continue. Pourtant privée de 7è rapport la consommation reste correcte et permet d’envisager des longs trajets. C’est surtout, et comme toujours chez Renault, cette façon dont la suspension épouse la route, la direction communicative même lors d’un simple changement de file et ce moteur qui investit la cabine. Oui elle s’est embourgeoisée, mais seulement sur les bons points, ceux dans l’interaction homme-machine en dehors de ce qui touche à la conduite ; c’est-à-dire les écrans et système de bord. Pour la conduite, la compacte jaune reste une traction brute avec toutes les limitations physiques que cela entraîne.
La Megane se révèle alors comme une voiture entre deux mondes, l’analogue et le digital, coincée entre deux époques. Il y a le charme indescriptible d’une compacte sportive “old school” mais savamment mélangée avec des éléments modernes. Cela donne naissance à un metissage intéressant qui m‘atriste par sa disparition programmée, en emmenant avec elle la fin de Renault Sport. La Megane RS n’est pas qu’une bonne voiture c’est avant tout une voiture importante, car elle marque une rupture dans l’industrie de l’automobile et marque le début de la fin des moteurs à combustion, au profit des moteurs électriques. Mais pour le moment, derrière son volant je souris encore et je comprends l’importance de profiter de chaque passage de rapport, de chaque mise en mouvement, de chaque vocalise du moteur car cela sera bientôt des éléments appartenant au passé.
Note, mention et conclusion
Note : 79,5/100
Extérieur – 16/20
Intérieur – 15/20
Moteur – 17/20
Dynamisme & Sensations – 17,5/20
Confort & Praticité – 14/20
Pour clore le chapitre Renault Sport, la marque française, dans son dernier souffle, nous livre sa vision d’une compacte sportive parfaite et atteint une certaine forme de d’excellence. Après des décennies d’expérience en la matière, Renault nous prouve une fois de plus que les compactes sportives de la marque au losange se retrouveront, toutes, au panthéon de l’automobile.
Merci à Renault France et en particulier à Fabrizio et Jerôme.